dimanche 17 juin 2018

Homélie du 11ème Dimanche année B


Homélie du 11ème Dimanche année B
Carmel de Saint-Maur —Père Maurice Boisson

                        Un ami qui venait de vivre un événement fort, chargé d’émotion, qui le touchait profondément, me disait : «  Je n’ai pas de mots pour te dire,  je ne sais pas comment dire ! » C’est parfois difficile de trouver les mots - les vrais bien sûr, pour exprimer une expérience intérieure d’admiration, d’indignation, de bonheur ou de peine. Les mots nous manquent pour dire l’essentiel.

            C’est le cas pour Jésus dans cet Evangile. Il veut nous parler du Royaume, du règne de Dieu et les mots lui manquent. C’est le coeur de sa vie, c’est le pourquoi il est envoyé : le Royaume, le règne de Dieu. Ce sont des mots et des réalités difficiles. Un royaume, un règne, pour des franc-comtois, ça ne suscite pas d’emblée un grand enthousiasme ! Le Royaume de Dieu, c’est notre monde, c’est nous, notre humanité en train de devenir « monde de Dieu », dès maintenant et ici. Il le sera totalement au terme de l’histoire, réalisé par le Christ, un monde où « Dieu sera tout en tous  » (1Co15,28), un monde d’amour, de justice et de paix.  Ce monde qui nous est promis, est déjà là, parmi nous. Et il est à réaliser au quotidien.


            C’est sa vie, à Jésus ! C’est pourquoi il a du mal à l’exprimer avec des mots. « À quoi allons-nous comparer le règne de Dieu ? » Par quelle image pouvons-nous le représenter ? » Alors, il prend des choses simples de la vie quotidienne, de l’environnement des gens qui l’écoutent.
            « Le règne de Dieu, c’est comme… » Ce n’est pas ceci ou cela, c’est comme, cela ressemble à … La parole est déjà plus accessible.
            Le règne, le Royaume de Dieu, c’est comme quand on sème de la graine : elle pousse si on dort et si on se lève. C’est comme une graine qui devient un arbre.
            Notre monde, transformé en monde de Dieu se ferait tout seul ? Si oui, on ne serait pas là où on en est !
            Pour que la graine pousse, il faut certaines conditions, que Jésus n’oublie pas dans cet Evangile : « Il en est du règne de Dieu comme d’un homme qui jette en terre la semence ». Il faut semer, et semer en terre, pas sur les cailloux ou dans le vent. Il faut semer une semence qui soit vivante, qu’elle ne soit pas sèche et morte. Il faut qu’elle ait en elle cette énergie vitale lui permettant de se développer. Il sera nécessaire aussi de travailler la terre, d’arroser si besoin, de prendre soin de la plantation pour favoriser son développement. Dieu agit, même si on dort mais à condition qu’on sème ! « Un homme qui jette en terre la semence » : c’est notre responsabilité de semeur et alors Dieu agira.

            Ce que l’on sème, c’est notre manière de vivre pour soi et pour les autres. Si nous vivons dans la paix, dans la justice, dans la vérité, dans l’amour, dans ce que nous avons à faire, dans l’écoute, dans le respect, dans la recherche de Dieu, alors ces semences pousseront. Les comparaisons que prend Jésus nous rendent attentifs à notre vie concrète, réelle, là où d’abord germent les graines de Dieu : en nous-mêmes. Alors, nous pourrons prendre de la graine pour la semer ailleurs.
            Une graine, c’est peu de chose, dit Jésus, comme une graine de moutarde : on la met en terre, première condition, elle est toute petite. Une fois semée, elle prend du volume, à tel point que les oiseaux peuvent y faire un nid !
            Pour que se réalise le Royaume de Dieu, Jésus nous rend attentifs à semer en terre, dans la vie, pas dans le vent, ces petits gestes, ces attentions, ces écoutes, ces paroles, ces regards, ces présences, ce temps donné ou des engagements plus forts dans divers domaines de la société, de la vie du monde et de l’Eglise.
            Semons des graines vivantes, qui ont en elles l’énergie qui les fera pousser. Le Père Congar (o.p), un des acteurs du Concile Vatican II, écrivait dans son journal : «  Entre 1kg de graines de blé vivant et une tonne de bois mort, je n’hésite pas. » Ces paraboles sur le Royaume de Dieu nous disent aussi que le temps des semailles n’est jamais séparé du temps de la patience et de la confiance. C’est bien sûr le temps de l’espérance, non pas dans la passivité - « Si ça pousse tout seul, alors laissons faire ! »

            Le temps de l’espérance est celui de la responsabilité de semer dans la terre de la vie quotidienne des semences du Royaume, du monde de Dieu, faisant ce qui nous revient de faire, tout en étant dociles à Celui qui fait pousser.
            Confiance, patience, espérance sont inséparables d’une part d’invisible. « Nous cheminons dans la foi, non dans la claire vision (2ème lecture).

            Que l’Esprit Saint nous rende capables de semer de petits commencements et de voir en eux des promesse d’avenir.

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