Homélie 2ème dimanche de Pâques
Année C 2019
Dimanche de la Divine Miséricorde.
Carmel de St Maur – Père Maurice BOISSON
Ac
5,12-16 ; Ap 1,9-11a.12-13.17-19 ; Jn 20,19-31.
Cet ami Thomas ! Il a traversé les siècles, il est toujours
d’actualité, souvent cité : « Comme Saint Thomas, je crois qu’à ce
que je vois ! »...
Saint Thomas n’est pas seulement notre « jumeau »
(c’est son surnom « Didyme »). Qui n’a jamais douté ? Il est surtout à la pointe de l’actualité dans
notre société : il veut voir, toucher, vérifier, avoir des preuves, faire
des expertises... Il est surtout en panne de confiance.
Il n’y croyait plus. Il ne croyait plus, Thomas, blessé au plus
profond de lui-même par l’échec apparent de Jésus sur qui il avait tout misé.
La belle aventure des débuts se terminait par la croix et la mort.
Thomas ne fait pas la forte tête quand il ne croit pas ses
collègues lui disant : « On a
vu le Seigneur ! ». Mais quelque chose en lui s’est cassé :
le doute, la déception, la méfiance prennent la place de la confiance. Qui n’a
pas connu cette expérience ? Dans les amis de Thomas, Pierre lui-même, le
leader, avait renié Jésus, Judas l’avait livré, chacun s’était sauvé, caché...
Quand les appuis cèdent, on peut s’écrouler. Quelque chose peut
se casser dans notre propre cœur, qui nous « casse la brasse » disait ma maman, quand les évènements, les autres
et nous-mêmes, nous cabossent et nous verrouillent...
« Les portes du lieu
où se trouvaient les disciples étaient verrouillées ». Les portes,
surtout les cœurs étaient verrouillés. C’est pire. Les portes, on peut les
forcer pour les ouvrir, mais pas les cœurs. Ils ne s’ouvrent que dans la
douceur et la présence. Jésus a réussi à ouvrir le cœur de Thomas et des
autres, et peut ouvrir les nôtres, sans forcer, par la douceur, la paix et la
présence.
« Jésus vint. Il
était là, au milieu d’eux. Il leur dit : « La Paix soit avec
vous ! »... en vous. La Paix qui apaise, qui calme, qui ouvre à
autre chose qu’à nos peurs... la présence, ce qui rassure et redonne confiance.
La confiance peut alors re-naître par une présence réelle, qui chasse le doute
et la méfiance... et le refus de Thomas.
« Mets ta main dans
mes plaies »... Thomas, en touchant Jésus, dépose ses propres blessures
dans la plaies du Ressuscité. Tes propres plaies, tes cabosses, dit Jésus, deviendront elles aussi ressuscitées.
Jésus ne reproche rien à Thomas ; avec douceur et présence,
il lui tend ses mains et le côté de son cœur transpercé... Là où Thomas laisse
cicatriser et réparer sa panne de confiance, dans la relation retrouvée, renouvelée,
ressuscitée. « Mon Seigneur et mon
Dieu ! ». C’est ça la miséricorde que nous célébrons ce
dimanche ; pas des discours : l’agir et l’être même de Dieu qui nous
presse à être et à faire comme Lui.
« Dieu n’est qu’Amour
et Miséricorde » dit Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus.
Miséricorde : une qualité d’être et d’agir, celle de Dieu ; 2 mots
pour n’en faire qu’un. « Corde », « Cor », le cœur touché
par les « miseri » : les misères de toutes sortes. Une
sensibilité et un agir du cœur et des entrailles à toutes misères.
« Avance ta main,
mets-la dans mon côté » dit Jésus à Thomas. Thomas fait l’expérience
de la foi et de la confiance dans la rencontre de l’humanité de Jésus
ressuscité. « Dans tes blessures
cache moi » dit une prière de Saint Ignace.
Qui serions-nous sans les doutes et les refus de Thomas
transformés en confiance ? Qui serions-nous sans la lâcheté de Pierre,
transformée en Amour ? Qui serions-nous sans les pleurs de Marie-Madeleine
transformés en annonce de la Résurrection ? Qui serions-nous sans les
plaies de Jésus devenues Corps Ressuscité de Vie ?
On est plus proche du Christ, de Dieu, des autres et de
nous-mêmes avec nos blessures, nos cicatrices, qu’avec nos carapaces. Nos
blessures et nos cicatrices nous rendent plus poreux à la tendresse du Père et
aux misères de nos frères et sœurs, et des nôtres. Pour accueillir, comme Saint
Thomas, la Miséricorde de Dieu qui nous fait miséricordieux à notre tour comme
lui-même est Miséricordieux. « Avance ta main, Thomas, mets-la dans mon
côté, du côté de mon cœur ».
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