« Affrontons la terreur avec l’amour », c’est
l’encouragement du pape François devant les participants à la 3e rencontre
mondiale des mouvements populaires, le 5 novembre 2016. Devant quelque 5000
personnes de plus de 60 pays, le pape a fustigé le terrorisme de l’argent,
l’atrophie morale du monde, invitant à changer les sociétés consuméristes par
l’exemple.
Lors de cette rencontre qui a eu lieu dans la salle Paul VI du
Vatican en fin d’après-midi, le pape a encouragé à adopter « un projet de
vie qui rejette le consumérisme et retrouve la solidarité, l’amour entre nous
et le respect pour la nature comme valeurs essentielles ». C’est-à-dire
mener « une bonne vie », et non « la belle vie ».
Le terrorisme de l’argent
Le pape a longuement mis en garde contre la divinisation de
l’argent : l’argent gouverne, a-t-il dénoncé, « avec le fouet de la
peur, de l’inégalité, de la violence économique, sociale, culturelle et
militaire qui génère toujours plus de violence dans une spirale descendante qui
semble ne jamais finir ».
Le monde connaît « un terrorisme de base qui dérive du
contrôle global de l’argent sur la terre et menace toute l’humanité », a
poursuivi le pape François. Ce terrorisme de base nourrit ensuite « les
terrorismes dérivés comme le narco-terrorisme, le terrorisme d’Etat et celui
que certains appellent de façon erronée ‘terrorisme ethnique ou religieux’ ».
Mais « aucun peuple, aucune religion n’est terroriste », a-t-il
assuré. Le terrorisme est initié par « l’idole argent qui règne au lieu de
servir, tyrannise et terrorise l’humanité ».
Le terrorisme de l’argent joue sur la peur, a encore constaté le
pape. Peur qui « en plus d’être une bonne affaire pour les marchands
d’armes et de mort, nous affaiblit, nous déstabilise, détruit nos défenses
psychologiques et spirituelles, nous anesthésie face à la souffrance des autres
et à la fin nous rend cruels (…). Derrière cette cruauté qui semble se
massifier il y a le souffle froid de la peur ».
Contre la peur, le pape François a donné « le meilleur
antidote » : la miséricorde. Beaucoup plus efficace « que les
antidépressifs et les anxiolytiques, (…) que les murs, les grilles, les alarmes
et les armes ». « Nous ne laissons pas tromper. Affrontons la terreur
avec l’amour », a-t-il exhorté : « Contre la terreur, le
meilleur remède est l’amour ».
L’atrophie morale du monde
Le pape a aussi évoqué les personnes « privées de la
dignité du travail ». Et de fustiger « l’atrophie du système
socio-économique dominant qui est le chômage ». « Nous devons aider
le monde à guérir de son atrophie morale », a-t-il déclaré, afin de
promouvoir un développement « humain, intégral, respectueux de la
création ».
De même, le pape s’est arrêté sur le drame des
migrants et des réfugiés, « une situation d’opprobre », une
« honte ». Ils sont, a-t-il ajouté, victimes de guerres et d’un
système socio-économique injuste édifié par « beaucoup de ceux
qui refusent de les accueillir ».
« Je vous demande d’exercer cette solidarité si spéciale
qui existe entre ceux qui ont souffert, a lancé le pape aux mouvements
populaires : vous savez relever des usines de la faillite, recycler ce que les
autres jettent, créer des postes de travail, cultiver la terre, construire des
habitations, intégrer des quartiers ségrégués ». Un exemple, a-t-il
suggéré, qui aidera peut-être la communauté internationale à adopter les
mesures nécessaires pour accueillir les migrants et affronter les causes des
migrations.
L’austérité comme mode de vie
Autre thème abordé par le pape au fil de son long
discours : la relation entre peuple et démocratie. Il a appelé à
« refondre les démocraties qui sont en train de traverser une vraie
crise ». Il a ainsi constaté que « l’écart entre les peuples et
nos formes de démocraties actuelles grandit toujours plus à cause de l’énorme
pouvoir des groupes économiques et médiatiques ».
Le pape a souligné deux risques dans l’engagement des mouvements
populaires en politique : le risque de se laisser enfermer dans certains
domaines et celui de se laisser corrompre. « Ne tombez pas dans la
tentation de la ‘case’ qui vous réduit à des acteurs secondaires ou, pire, à de
simples administrateurs de la misère existante », a-t-il exhorté. Les
peuples doivent être au contraire des « protagonistes » de la
recherche du bien commun.
Quant à la tentation de la corruption, le pape François a donné
le meilleur des remèdes : l’austérité. « Il faut vivre la vocation du
service avec un fort sens d’austérité morale, d’austérité dans le mode de
vivre », a-t-il estimé. Mais à celui qui est « trop attaché aux biens
matériels ou au miroir, qui aime l’argent, les banquets abondants, les maisons
somptueuses, les vêtements raffinés, les voitures de luxe », le pape a
déconseillé de s’engager en politique ou dans le social, où il ferait
« beaucoup de mal ».
Applaudi à de maintes
reprises durant son discours prononcé en espagnol, l’évêque de Rome a aussi
invité à « prêcher par l’exemple » : « Je vous demande de
ne pas sous-estimer la valeur de l’exemple car il a plus de force que mille
paroles, mille tracts, mille ‘j’aime’, mille retweets, mille vidéos sur
youtube ».
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire