Homélie pour la fête de Sainte Elisabeth de la Trinité
Carmel de Saint Maur- Père Maurice Boisson
Les belles histoires d’amour ne se trouvent pas
seulement dans les séries télévisées, dans les romans ou au cinéma ! Les vraies
histoires d’amour sont l’histoire de nos vies, pas dans les rêves ni dans les
aventures à l’eau de rose. Aimer, c’est le carburant de nos vies, sinon on est
en rade quelque part. C’est cette énergie intérieure qui fait qu’on peut
donner, recevoir, donner de soi, de ce que l’on est, de ce que l’on a, pour sa
famille, son métier, pour une cause, pour soutenir et prendre soin des amis,
pour favoriser une meilleure vie ensemble, pour consacrer plus totalement sa
vie à Dieu, à l’Évangile, etc…
Quel est le ressort de nos vies ? Sinon aimer, qui
rend possible la sortie de soi.
« Ce qui a fait ma vie, a écrit Sainte Élisabeth
de la Trinité, c’est de croire qu’un Être qui s’appelle l’Amour habite en nous
à tout instant et qu’il nous demande de vivre une relation avec
lui ».
Nous sommes habités par Dieu, qui n’est qu’Amour,
Trinité, non pas le grand solitaire des mondes mais habité lui-même par des
relations d’amour, de famille. C’est sur ce modèle que nous sommes fabriqués.
Ce message de Sainte Élisabeth est le rappel de l’Évangile que nous venons
d’entendre : « Si quelqu’un m’aime, mon Père l’aimera, nous viendrons chez
lui et chez lui, nous ferons demeure », dit Jésus.
La grandeur et la dignité fondamentale de l’être
humain est d’être l’habitation de Dieu. On sait bien que l’on peut en faire ce
que l’on veut d’une habitation, une ruine ou un lieu agréable où chacun se sent
bien.
Saint Augustin a mené une première partie de sa vie de
manière peu recommandable avec au fond de lui-même un désir, une recherche
d’autre chose, disons de Dieu, sans le nommer. Après s’être converti, il écrit,
s’adressant à Dieu : « Tu étais au-dedans de moi, et moi, j’étais au
dehors. C’est au dehors que je Te cherchais. Tu étais avec moi et je
n’étais pas avec Toi. » Cette expérience de la présence en nous de Dieu
Amour, qui est un des axes de la spiritualité d’Élisabeth, n’est pas toujours
évidente, même pour elle, qui écrit à une amie : « Quoique par le
sentiment, nous ne sentons plus sa présence, il est là tout de même et c’est là
que j’aime à le chercher ». Il est
là tout de même, « c’est la nuit qu’il est beau de croire à la
lumière ! » (Chantecler,
Edmond Rostang).
Quand cette présence de l’Amour nous échappe, quand
aujourd’hui, la noirceur de la violence, de la guerre, du mal tente d’obstruer
la source d’un rayon de lumière et d’amour, il me semble qu’il est là
« tout de même », écrit Élisabeth. SI nous essayons nous-même de
pacifier nos propres cœurs, nous pouvons être des artisans de paix.
Ce message de Sainte Élisabeth rappelle tout
simplement les fondamentaux de l’existence et de notre foi : Au plus
profond de nous-mêmes, Dieu Amour demeure comme une source faisant de nous des
êtres aimants et aimables parce qu’aimés. Ce message explique le grand
rayonnement international de cette petite carmélite morte à 26 ans, après une
enfance et une vie de jeune fille comme celles de son âge, pas du tout coincée,
bien à l’aise dans la vie du monde, coquette et convoitée. Elle a vécu cette
belle et vraie histoire d’amour, dans le don d’elle-même, à cette Personne qui
s’appelle Amour, demeurant au plus intime d’elle-même. Une présence qui l’a
transformée peu à peu à la ressemblance de Celui qui habitait en elle : un
Amour qui se communique et qui transfigure, comme quelqu’un peut être changé,
transfiguré par une rencontre, un choix et qui en rayonne. C’est le sens de
cette expression qu’affectionne Sainte Élisabeth: « À la louange de sa
gloire » (que l’on retrouve abondamment dans la 2ème lecture) et qui est
la conséquence de la demeure de Dieu en elle. Expression qui nous est sans
doute lointaine par le langage un peu difficile mais dont la réalité est simple
: la gloire, ce n’est pas le podium ou le tapis rouge de Cannes, c’est ce qui a
du poids, ce qui donne la valeur réelle à quelqu’un, ce qui compte, une richesse
intérieure qui transparait à l’extérieur dans un regard, l’expression d’un visage, une façon d’être,
des gestes, des paroles… dans lesquels transpire ce qui habite en nous. Cette
présence en nous de Dieu Amour nous fait rayonnant de cet Amour, même si le mot
est fort, ce rayonnement peut être modeste, discret, il n’en est que plus fort,
s’il n’éblouit pas mais qu’il éclaire. Quand on regarde un vitrail de
l’extérieur sans que l’Église soit allumée, on ne voit pas grand-chose. S’il y
a de la lumière à l’intérieur, on peut voir et admirer la beauté du vitrail.
C’est, pour nous, laisser traverser la lumière de l’Amour qui nous habite, ce
qui a du poids, ce qui compte, l’essentiel.
En terminant cette évocation très rapide de quelques
traits du message de Sainte Élisabeth de la Trinité et de son rayonnement pour
aujourd’hui, je lui laisse le mot de la fin :
« Au
soir de la vie, tout passe. L’Amour seul demeure. Il faut tout faire par
amour. »
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