lundi 14 novembre 2016

Homélie pour la fête de Sainte Elisabeth de la Trinité



Homélie pour la fête de Sainte Elisabeth de la Trinité
Carmel de Saint Maur- Père Maurice Boisson

Les belles histoires d’amour ne se trouvent pas seulement dans les séries télévisées, dans les romans ou au cinéma ! Les vraies histoires d’amour sont l’histoire de nos vies, pas dans les rêves ni dans les aventures à l’eau de rose. Aimer, c’est le carburant de nos vies, sinon on est en rade quelque part. C’est cette énergie intérieure qui fait qu’on peut donner, recevoir, donner de soi, de ce que l’on est, de ce que l’on a, pour sa famille, son métier, pour une cause, pour soutenir et prendre soin des amis, pour favoriser une meilleure vie ensemble, pour consacrer plus totalement sa vie à Dieu, à l’Évangile, etc…
Quel est le ressort de nos vies ? Sinon aimer, qui rend possible la sortie de soi. 
« Ce qui a fait ma vie, a écrit Sainte Élisabeth de la Trinité, c’est de croire qu’un Être qui s’appelle l’Amour habite en nous à tout instant et qu’il nous demande de vivre une relation avec lui ». 
Nous sommes habités par Dieu, qui n’est qu’Amour, Trinité, non pas le grand solitaire des mondes mais habité lui-même par des relations d’amour, de famille. C’est sur ce modèle que nous sommes fabriqués. Ce message de Sainte Élisabeth est le rappel de l’Évangile que nous venons d’entendre : « Si quelqu’un m’aime, mon Père l’aimera, nous viendrons chez lui et chez lui, nous ferons demeure », dit Jésus.
La grandeur et la dignité fondamentale de l’être humain est d’être l’habitation de Dieu. On sait bien que l’on peut en faire ce que l’on veut d’une habitation, une ruine ou un lieu agréable où chacun se sent bien. 

Saint Augustin a mené une première partie de sa vie de manière peu recommandable avec au fond de lui-même un désir, une recherche d’autre chose, disons de Dieu, sans le nommer. Après s’être converti, il écrit, s’adressant à Dieu : « Tu étais au-dedans de moi, et moi, j’étais au dehors. C’est au dehors que je Te cherchais. Tu étais avec moi et je n’étais pas avec Toi. » Cette expérience de la présence en nous de Dieu Amour, qui est un des axes de la spiritualité d’Élisabeth, n’est pas toujours évidente, même pour elle, qui écrit à une amie : « Quoique par le sentiment, nous ne sentons plus sa présence, il est là tout de même et c’est là que j’aime à le chercher ».  Il est là tout de même, « c’est la nuit qu’il est beau de croire à la lumière ! » (Chantecler, Edmond Rostang). 
Quand cette présence de l’Amour nous échappe, quand aujourd’hui, la noirceur de la violence, de la guerre, du mal tente d’obstruer la source d’un rayon de lumière et d’amour, il me semble qu’il est là « tout de même », écrit Élisabeth. SI nous essayons nous-même de pacifier nos propres cœurs, nous pouvons être des artisans de paix. 
Ce message de Sainte Élisabeth rappelle tout simplement les fondamentaux de l’existence et de notre foi : Au plus profond de nous-mêmes, Dieu Amour demeure comme une source faisant de nous des êtres aimants et aimables parce qu’aimés. Ce message explique le grand rayonnement international de cette petite carmélite morte à 26 ans, après une enfance et une vie de jeune fille comme celles de son âge, pas du tout coincée, bien à l’aise dans la vie du monde, coquette et convoitée. Elle a vécu cette belle et vraie histoire d’amour, dans le don d’elle-même, à cette Personne qui s’appelle Amour, demeurant au plus intime d’elle-même. Une présence qui l’a transformée peu à peu à la ressemblance de Celui qui habitait en elle : un Amour qui se communique et qui transfigure, comme quelqu’un peut être changé, transfiguré par une rencontre, un choix et qui en rayonne. C’est le sens de cette expression qu’affectionne Sainte Élisabeth: « À la louange de sa gloire » (que l’on retrouve abondamment dans la 2ème lecture) et qui est la conséquence de la demeure de Dieu en elle. Expression qui nous est sans doute lointaine par le langage un peu difficile mais dont la réalité est simple : la gloire, ce n’est pas le podium ou le tapis rouge de Cannes, c’est ce qui a du poids, ce qui donne la valeur réelle à quelqu’un, ce qui compte, une richesse intérieure qui transparait à l’extérieur dans un regard,  l’expression d’un visage, une façon d’être, des gestes, des paroles… dans lesquels transpire ce qui habite en nous. Cette présence en nous de Dieu Amour nous fait rayonnant de cet Amour, même si le mot est fort, ce rayonnement peut être modeste, discret, il n’en est que plus fort, s’il n’éblouit pas mais qu’il éclaire. Quand on regarde un vitrail de l’extérieur sans que l’Église soit allumée, on ne voit pas grand-chose. S’il y a de la lumière à l’intérieur, on peut voir et admirer la beauté du vitrail. C’est, pour nous, laisser traverser la lumière de l’Amour qui nous habite, ce qui a du poids, ce qui compte, l’essentiel.

En terminant cette évocation très rapide de quelques traits du message de Sainte Élisabeth de la Trinité et de son rayonnement pour aujourd’hui, je lui laisse le mot de la fin :
« Au soir de la vie, tout passe. L’Amour seul demeure. Il faut tout faire par amour. »

Aucun commentaire: