Homélie, 23ème dimanche C
Père M. Boisson, Carmel de Saint-Maur
On pourrait croire que Jésus est en campagne électorale : "Préférez-moi",
"venez à moi", "suivez-moi".
Non! L’Évangile n'est pas une propagande pour récupérer du
monde. Il s'agit d'une proposition de façon de vivre, pour notre bien et celui
des autres. On est sans cesse amenés à faire des choix, à privilégier telle
décision, telle orientation plutôt que telle autre.
Choisir, c'est se priver de certaines choses dont on aurait
envie, c'est renoncer à certains projets pour en faire d'autres, c'est mettre
des priorités dans le budget, dans l'emploi du temps, dans le carnet de
relations, dans les nombreuses sollicitations... Choisir en vue de quoi ?
Qu'est-ce qui nous guide ? Ce que nous pensons être le meilleur
pour nous, ou bien nos petits (ou grands) intérêts égoïstes, ou ce qui
correspond à nos convictions, à nos valeurs, au fait que nous sommes
chrétiens...Nos choix peuvent être aussi conditionnés par des contraintes, des
événements extérieurs; parfois, on n'a pas le choix !
C'est de cela dont nous parle Jésus aujourd'hui... de nos choix.
"Préférez-moi, si vous voulez être des miens" dit
Jésus. Préférez moi, c'est-à-dire ma personne, tout mon message et ce que
révèle ma vie. Préférez moi à tout, à vos plus proches, comme à vous-mêmes.
Faut-il alors renoncer à prendre soin de son prochain, de sa famille, de
soi-même? Faut-il renoncer à aimer ? La jalousie serait-elle aussi dans le cœur
de Dieu et du Christ ? Non. "Si quelqu'un vient à moi sans me
préférer"! Préférer n'est pas mépriser, ni abandonner, ni aimer moins,
c'est montrer, par nos choix, une préférence. Ce n'est pas une concurrence
entre l'amour de Dieu et l'amour des autres, ce qui serait tout le contraire de
Dieu lui-même et hélas, la source de comportements et de spiritualités
destructeurs. Les deux commandements ne font qu'un : " Tu aimeras le
Seigneur, tu aimeras ton prochain". "La mesure de l'amour, c'est
d'aimer sans mesure" dit Saint Bernard. La question de Jésus dans le
message d'aujourd'hui est celle-ci : "A qui, à quoi donnes-tu la
préférence ? Qu'est-ce qui détermine tes choix de vie, ton style de vie? Comme
dit le Pape François, non pas dans les idées et les théories mais dans le fil
quotidien des jours, des événements, des activités, des relations, des
décisions... La question que nous pose Jésus et qu'on a besoin de réentendre de
temps en temps est celle-ci : "Est-ce que tu vis à la chrétienne, puisque
tu es des miens ? À quoi donnes-tu la préférence ?"
"Ma préférence à moi" dit une chanson. C'est quoi ma
préférence ? L'opinion de tout le monde ? La pensée unique ? Mon petit ou grand
intérêt ? Jésus nous invite, dans nos choix, à ne pas perdre l'essentiel, l’Évangile, nos vraies valeurs, nos convictions, notre foi. Un choix est un
renoncement mais en même temps, une porte d'accès à une liberté, à une paix
intérieure, à un plus d'humanité. C'est pourquoi Jésus, après avoir attiré
notre attention sur notre préférence, nous parle de celui qui veut bâtir :
qu'il commence par voir s'il a de quoi réaliser son projet! On a bien compris qu'il s'agit de la
construction de notre vie, de notre maison intérieure. Il s'agit de la
construction de nous-mêmes. Et nous nous construisons nous-mêmes par les choix
que nous faisons. Nous contribuons à construire une société, une communauté,
une famille, un monde meilleur. On ne se bâtit jamais tout seul, "nul
n'est une île. " Si le Seigneur ne bâtit la maison, en vain travaillent
les ouvriers." (Ps127) C'est ce bâtisseur qui peut éclairer, orienter nos
choix et nous aider à les réaliser, à condition que nous soyons disposés à
collaborer à cette œuvre de construction, dont la solidité, la beauté, la durée
dépendent de nos préférences.
Ma préférence à moi, notre préférence à nous, c'est quoi ?
On ne peut pas tous faire comme Mère Teresa. Mais on peut tous
faire des choix, si petits soient-ils, qui signifient pour les autres l'Amour
du Christ.
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