Homélie du 24ème dimanche C, 11
septembre 2016
Carmel de Saint-Maur - P. Maurice Boisson.
« Vous avez vu chez qui il a mangé ! Il n’y a pas plus
crapules que ces gens-là ! Et il leur fait courbettes et sourires ! Ce n’est
pas étonnant qu’ils viennent l’écouter !…
Et ils ricanaient, ces notables religieux : « Cet homme,
Jésus, fait bon accueil aux pécheurs ! Même qu’il mange avec eux, pensez donc
! »
Heureusement pour nous que Dieu est comme ça ! Sinon, il ne
mangerait pas avec nous en ce moment et on n’aurait guère de chance qu’il
vienne jusqu’à nous pécheurs !
Jésus ne répond pas par des théories et des explications
difficiles. Jésus leur dit trois petites histoires prises dans la vie. Une
seule aurait peut-être suffi. Mais Jésus nous connait bien. Comme dit la première
lecture, on a « la nuque raide », on est un peu réticent à comprendre
combien la miséricorde de Dieu est infinie… surtout quand elle s’applique aux
autres.
Un troupeau de 100 brebis, l’une se perd.
Le berger laisse les autres et fait tout pour la retrouver. Il
la retrouve. C’est la joie et la fête avec les amis. Une sur 100. Est-ce que
cela valait le coup d’abandonner les autres et de les mettre en danger ? Chacun
est unique et a du prix aux yeux de Dieu.
Une pauvre femme avait 10 pièces d’argent, c’était son bien.
Elle perd une pièce. Voilà qu’elle renverse toute la maison pour la retrouver.
«ça y est, je l’ai retrouvée ! ». C’est la joie et la fête avec les
voisines autour d’un thé. Pourtant, il en restait encore 9 ! Chacun de nous
compte comme un trésor dans le coeur de Dieu.
Un homme avait deux fils. L’un quitte la maison et la famille
sur un coup de tête pour vivre sa vie ailleurs. Ce père ne désespère pas du
retour de son fils il l’attend, chaque jour assis sur un talus, d’où il peut
guetter où débouche la route, à la sortie d’une côte… Le voilà ! Il court à sa
rencontre, l’embrasse en le serrant fort dans ses bras. Revenu à la maison, il
lui redonne sa dignité de fils de la maison, la bague de la famille, des
sandales (les esclaves marchaient pieds nus). On fait la fête, c’est la joie;
sauf pour le fils aîné, celui que nous sommes parfois.
Pas de théories en réponse aux récriminations des pharisiens: le
portrait du visage et du coeur de Dieu. La joie du Père quand quelqu’un se
convertit, c’est-à-dire se relève, repart, revient se retrouve dans les bras de
Dieu, comme la brebis sur les épaules du Berger. Joie de nous-même, fils parti
et revenu, brebis égarée et retrouvée, joie de nouveaux départs pour une vie
nouvelle et une vraie liberté. Se savoir « miséricordié », aimé,
pardonné n’a rien à voir avec la faiblesse, le laisser-faire, c’est au
contraire l’accueil d’une force intérieure pour répondre à un amour toujours
offert, et à être digne de cet Amour, de ce qu’Il attend de nous. C’est de se
savoir aimé et d’aimer qui nous change.
La miséricorde de Dieu pour nous et celle que nous pouvons
manifester aux autres, ce n’est pas un coup de serpillère, ni un savon, ni un
bonbon. C’est un regard au plus profond de nous-même qui atteint notre
responsabilité, non pas en nous jugeant, mais en nous aimant, en nous espérant,
en nous aimant comme un aimant qui attire vers le bien, le meilleur, en nous
aimant non seulement tels que nous sommes mais tels que nous pouvons devenir.
C’est nous espérer dans une réponse d’Amour qui nous engage.
Contemplons les mains et les bras du Père dont la tendresse se
pose sur nos épaules. Laissons-nous regarder par les yeux du Père, des yeux
usés à pleurer et à regarder le bout de la route. Et parce qu’on ne peut voir
bien certaines choses qu’avec des yeux qui ont pleuré, ce regard du Père nous
rejoint et nous tire à Lui. « Je t’aime quand même. » « Je
t’aime…quand même, je t’espère. »
« Alors, ce que je fais pour toi » dit le Père,
« ce que je fais pour la brebis, ce que je fais pour retrouver ma pièce,
mon bien, fais-le aussi pour les autres ».
« Soyez miséricordieux, comme votre Père est
miséricordieux! »(Lc 6,36).
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