vendredi 6 mai 2016

HOMELIE ASCENSION DU SEIGNEUR 2016

HOMELIE ASCENSION DU SEIGNEUR  2016
Carmel de Saint-Maur - Mgr Philippe Gueneley

                                                                              Ac 1, 1-11 ; Ep 4, 1-13 ; Lc 24, 46-53
         L’Ascension apparaît comme un accomplissement de la mission de Jésus, « depuis le moment où il commença jusqu’au jour où il fut enlevé au ciel et après avoir, par l’Esprit Saint, donné ses instructions aux apôtres qu’il avait choisis. »

         Ceux-ci avaient espéré que Jésus rétablirait le royaume pour Israël. Mais Jésus avait dit et réalisé autre chose : il avait souffert, il était mort sur une croix, il était ressuscité d’entre les morts le 3ème jour, il avait proclamé la conversion pour le pardon des péchés. Il avait annoncé qu’ils recevraient une « force », une « puissance venue d’en haut », « quand le Saint-Esprit viendrait sur eux », et il les avait chargés d’une mission : être ses témoins à Jérusalem  d’abord – donc ils ne devaient pas quitter cette ville - puis en Judée, en Samarie et dans toutes les nations.


         La disparition visible de Jésus auraient pu les démoraliser, les inquiéter. Certes, elle les interroge, mais ils ne sont pas angoissés. Au contraire, ils sont en « grande joie. » Ils ne cessent pas de bénir Dieu dans le Temple. Il faut dire qu’ils ont reçu la bénédiction de Jésus : « Levant les mains, il les bénit. Or, tandis qu’il les bénissait, il se sépara d’eux et il était emporté au ciel. »

         « Galiléens, pourquoi restez-vous là à regarder vers le ciel ? Ce Jésus qui a été enlevé au ciel d’auprès de vous, viendra de la même manière que vous l’avez vu s’en aller vers le ciel. » Il est facile d’imaginer la scène. Elle est celle d’un départ de quelqu’un avec qui  l’on a vécu longtemps. Nous avons sans doute fait l’expérience du départ sur un quai de gare d’un membre de notre famille ou d’un ami. Le train va partir. Il reste encore quelques minutes pendant lesquelles il y aurait beaucoup à se dire. Et puis, le train part. On demeure immobile, muet, jusqu’à ce que le dernier wagon disparaisse à nos yeux. On éprouve alors une sorte de vide. Qu’allons-nous devenir sans la présence de celui qui vient de nous quitter ?

         « Pourquoi restez-vous là à regarder vers le ciel ? », disent les deux hommes en vêtements blancs aux Apôtres. Ceux-ci font alors l’expérience de son absence. Ils ne le voient plus comme auparavant. Expérience difficile, mais nécessaire et bénéfique. Ils vont passer à un autre mode de relation avec le Christ : celui de la foi. Croire sans voir.

         Jésus n’est plus visible et pourtant il demeure présent avec nous tous les jours, d’une présence cachée, discrète. L’expérience de son absence nous conduit à croire en sa présence. Ce que les yeux ne voient pas, la foi l’atteste. « Je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin des temps. »

         Jésus n’est plus visible, mais il demeure agissant par sa Parole et par son Esprit, l’Esprit qui est une force qui rend capable de témoigner de Jésus. « Le Seigneur travaillait avec eux et confirmait la Parole par les signes qui l’accompagnaient. » Jésus est présent en chaque croyant par son Esprit.

         Jésus n’est plus visible, mais il demeure présent de façon unique et bien réelle dans l’eucharistie, sous les espèces du pain et du vin, qui deviennent son corps et son sang par la puissance de son Esprit et de ses paroles redites en mémoire de lui. La messe est vraiment la Pâque qui rejoint notre vie. Grâce à la messe Jésus s’approche de nous et comble notre vie de cette grâce de salut qui s’écoule de la croix et jaillit de la résurrection. Dieu continue de se donner dans la Pâque de Jésus qui est célébrée sacramentellement dans les rites de la messe.

         Ainsi, Jésus élevé à la droite du Père, ne nous laisse pas orphelins ni seuls. Il continue dans toute l’humanité et en chacun de nous son œuvre de salut. Bien plus, il confie à ses apôtres et à ses disciples d’aller dans le monde entier et de proclamer la Bonne Nouvelle en suscitant la foi et en baptisant. Il associe à sa mission ceux qui deviennent croyants : « En mon nom, ils expulseront les démons ; ils parleront en langues nouvelles ; ils prendront des serpents dans leur mains et, s’ils boivent un poison mortel, il ne le fera pas de mal ; ils imposeront les mains aux malades, et les malades s’en trouveront bien. » (Mc 16, 17-18) Cette mission concerne toute l’Eglise, elle nous est confiée à nous, là où nous vivons. Être témoin du Christ, de ses commandements, de ses paroles, vivre de son Esprit : c’est la vocation de tout baptisé. Annoncer la Bonne nouvelle, l’Évangile de charité, de vie, de joie, de liberté, de vérité. Annoncer par nos paroles, et aussi par nos actes, par notre comportement, spécialement en étant attentif aux plus pauvres et aux plus fragiles.

 

         Jésus est passé de ce monde à son Père. Par lui, nous sommes déjà auprès du Père, alors que nous sommes encore sur cette terre. « Lui est avec nous, alors que nous sommes aussi avec Lui. » (Saint Augustin)

         Sans nous arracher aux pesanteurs, aux souffrances, aux obscurités, aux épreuves et aux questions de notre vie humaine sur cette terre, la foi en Dieu que l’on ne voit pas ouvre un passage sur un monde nouveau : « L’Ascension de ton Fils est déjà notre victoire. » Jésus, le premier, a fait le passage de ce monde à son Père. Nous espérons être auprès de lui dans la gloire. Depuis sa résurrection, la lumière du ciel ne cesse pas de briller sur la terre. L’Eglise qui, par la prédication, la catéchèse et par le baptême engendre à une vie nouvelle et immortelle des fils conçus du Saint-Esprit, nous invite à être porteurs d’espérance et acteurs de cette vie nouvelle donnée par le Christ. Jésus a ouvert la route, il a même ouvert les cieux, ils se sont ouverts pour lui. Tout trouve alors son sens plénier et son accomplissement en Dieu au-delà de notre vie sur terre. Saint Paul dit : « Si vous êtes ressuscités avec le Christ, recherchez les réalités d’en haut : c’est là qu’est le Christ, assis à la droite de Dieu. Pensez aux réalités d’en haut, non à celles de la terre. En effet, vous êtes passés par la mort et votre vie reste cachée avec le Christ en Dieu. Quand paraîtra le Christ, votre vie, alors vous aussi, vous paraîtrez avec lui dans la gloire. » L’Ascension de Jésus nous dit le sens profond de notre existence humaine, in fine, au terme : être avec le Christ dans la gloire du Père. La recherche des réalités d’en haut est le parcours de toute vie chrétienne qui s’inscrit à la suite du Christ et qui réalise notre vocation première.

         Dans cette eucharistie, qui est le sacrement mémorial de la passion, de la mort, de la résurrection et de l’ascension de Jésus, en attendant sa venue dans la gloire, Jésus donne un signe simple, humble et fragile de sa présence : du pain et du vin qui deviennent son corps et son sang. C’est un don qu’il nous fait pour nous dire sa présence et pour que nous annoncions sa vie, ses paroles et sa résurrection. C’est un don fait pour nourrir notre foi et pour que l’Eglise se construise comme Corps du Christ, chacun y exerçant sa responsabilité, sa mission. L’Eglise est porteuse de la présence du Christ. Par son existence même, elle dit la présence du Christ. Puisse-t-elle l’assurer avec fidélité !

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