Trinité, abîme de Miséricorde!
Nous achevions notre conversation. Elle avait été dense. La tristesse montait en moi. Rarement, j’avais rencontré quelqu’un de si sûr de lui. Une terrible solitude se dessinait derrière cette assurance. Ce blindage recélait sans doute une fragilité que j’aurais aimé mieux écouter. Dans ma méditation, je demandais au Seigneur comment éclairer ce frère. L’inviter à percevoir qu’un amour infini peut nous tirer de l’illusoire suffisance. L’évangile de ce dimanche me fut salutaire.
Jésus y décrit, mieux que quiconque, sa relation au Père et à l’Esprit. Dans la Sainte Trinité, chaque Personne est ouverture aux autres. Père, Fils et Esprit sont empreints de réciprocité. Aucune parole, aucun acte de Jésus en son ministère public ne sont auto satisfaits. Tout en Lui est intimement relié au Père et à l’Esprit. « Tout ce que possède le Père est à moi. L’Esprit reçoit ce qui vient de moi, afin de vous le faire connaître. » Chaque Personne de la Trinité, dont la spécificité est d’une insondable richesse, ne veut rien être sans les deux autres, dans leur révélation commune au cœur de l’homme.
On dit parfois familièrement que l’on se met « en quatre » pour aimer quelqu’un. Ici, la Trinité n’a de cesse de se mettre « en trois » dans son indivisible unité. La Trinité est altérité ! Elle appelle nos cœurs à s’ouvrir tout grands à son ineffable source. Nous ouvrir à Dieu trine, et nous offrir à nos frères, doit être en nous comme le même mouvement. « Ce que dira l’Esprit ne viendra pas de lui-même, insiste Jésus, Il me glorifiera. » Nous ne sommes pas ici dans un discours théorique. Il s’agit d’aimer ! Et il suffit de se mettre à l’école de l’aimable et aimante Trinité.
En ce siècle d’individualisme et d’exaltation de l’éphémère, la Trinité est Chemin de vie. Saint Bernard avait jaugé le risque psychologique et spirituel qui nous enferme en nous-mêmes. « Ne cherche pas ce qui est trop au-dessus de toi. Prends pour guide l’Esprit, et non ton propre jugement. Son enseignement vise moins à aiguiser ta curiosité qu’à enflammer ta charité. » Prenons l’Esprit pour guide ! Il enflammera le meilleur de nous-mêmes. Que l’année jubilaire convertisse notre regard sur la Trinité ! Puissions-nous l’adorer, non comme une divinité distante, mais comme le foyer d’amour le plus universel.
L’invitation du pape à ressourcer notre être dans la miséricorde ne peut que nous rendre plus intimes de la Trinité et plus attentifs à tout homme. Nombreux sont ceux qui, par la grâce de ce jubilé, découvrent que l’abîme de leur détresse n’est pas voué à la désespérance. À l’abîme de nos misères vient se proposer la Trinité. Elle est abîme de l’ineffable amour. La communauté chrétienne, si petite soit-elle, doit sa vie à la source trinitaire. Dans la plus humble chapelle, comme dans la plus somptueuse cathédrale, tout ce qui est vital et crucial se célèbre au nom du Père, du Fils et de l’Esprit. Comme dit le pape François, il incombe à la communauté d’être témoin de l’extrême amour divin envers toute créature. Trinité et miséricorde ne font qu’une et même réalité. Jésus est le visage parfait de la miséricorde. L’Esprit infuse en nous la pédagogie de cette conversion, il nous rend capables de miséricorde à notre tour. Envers ceux qui pensent légitimement que tout cela est au-dessus de leurs forces, et tous ceux qui usent aussi de ce prétexte pour ne rien faire, Jésus se fait à la fois prévenant et exigeant. « J’ai encore beaucoup de choses à vous dire. Pour l’instant, vous ne pouvez les porter »,reconnaît-il. Mais il ne manque pas de promettre : « l’Esprit de vérité vous conduira dans la vérité tout entière. » Moins le rendez-vous de la miséricorde semble évident, plus il est urgent !
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