Carmel de Saint-Maur - Père Maurice Boisson
Le
titre et la fonction de Roi ne font pas très bon ménage avec notre mentalité
républicaine. Ils nous renvoient à une historie ancienne !
N’empêche
que les rois et les reines ont toujours la cote : reine de Beauté, roi du
stade - ou utilisé comme injure ! …pour désigner les plus forts, les
meilleurs, les vainqueurs, les plus belles, les gagnants.
« Alors,
tu es Roi ? » - demande ironiquement Pilate à Jésus, en plein procès,
livré par les chefs religieux.
« Ma royauté n’est pas de ce monde », répond Jésus (Jean 18,36). « Je ne suis
pas roi à la manière des rois et des puissants de ce monde. »
Mais
qui es-tu donc, roi d’humilité, roi sans palais, roi sans armée ?
Une
crèche d’animaux est son berceau,
Un
ânon son carrosse,
Des
épines, sa couronne,
Son
palais ? La route et la maison des amis,
Quelques
amis, froussards, prêts à se sauver et à l’abandonner, constituent sa garde…
Son
trône et son podium ? La croix sur une colline,
Le
bord d’un lac, une barque, une petite montagne, pour délivrer un message à
l’humanité, aux pauvres qui l’écoutaient – message de bonheur, de paix, de
justice, d’amour.
Son
sceptre royal ? Ses mains nues de charpentier - mains de Dieu, qui
guérissent, consolent, relèvent, pardonnent, redonnent vie, touchent les yeux
fermés pour qu’ils voient, les oreilles bouchées pour qu’elles entendent, les
langues liées pour qu’elles parlent.
Ces
mains de Roi lavent les pieds poussiéreux de ses amis.
Ce
roi, commande-t-il en puissant dominateur ? Il se fait serviteur. Il n’a
rien d’un roi à la manière du monde, à tel point qu’on est obligé de le
désigner sur un panneau cloué au-dessus de sa tête sur la croix :
« Jésus de Nazareth, Roi des Juifs. »
Dans
quelques minutes, nous entendrons, dans la Préface, la description de son
Royaume : « Un règne de vie et de vérité, règne de justice, d’Amour
et de paix – sans limite et sans fin. »
Ce
règne n’est pas dans les nuages, l’irréel, le virtuel. Il est déjà là, ici et
maintenant, en forme d’ébauche, en train de se faire – c’est l’avenir de
l’humanité.
Oui,
il existe déjà ici et maintenant un monde autre que celui des kalachnikovs, de
la terreur et de la tuerie, de la destruction. Ces forces du mal sont vouées à
la mort parce qu’elles nourrissent la mort.
Le
Christ, ce Roi du Royaume d’amour et de fraternité, il est parmi les victimes
innocentes du Bataclan et d’ailleurs, comme il a été victime innocente,
crucifié lui aussi au nom de Dieu.
Ceux
qui ont crucifié Jésus, comme ceux qui ont tué, se sont trompés de Dieu. Jésus,
lui aussi, a offert sa vie, mais librement, parce qu’il a aimé, et pour la
cause de l’Amour. Il a donné sa vie non pour tuer mais pour aimer et rassembler
dans la fraternité. « Par son sang, il est notre Paix », dit Saint
Paul (cf. Colossiens 1,20).
Disciples
et amis de ce Christ qui a pris le pouvoir de ce monde d’amour, par l’amour, nous
sommes associés directement - par notre Baptême - à la construction de ce monde
autre ; par la prière, qui est comme un groupe électrogène fournissant
l’énergie par tous ces petits gestes ou engagements qui font les joints, qui
raccommodent les déchirures, qui soignent les blessures, qui soutiennent dans
l’épreuve, qui accompagnent, qui sont là, tout simplement, la présence, qui
traverse les distances, et qui témoigne qu’un Amour nous attend au terme de
l’histoire, qu’il est déjà là. Son Royaume s’ébauche à l’ombre de la Croix.
Mais déjà sa lumière traverse nos vies. Elle éclaire l’aujourd’hui et le
terme, le Royaume du Christ Amour.
1 commentaire:
Une belle homélie.
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